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<==  Liege - Lambert Pinsmaille/ Painsmay(e)

The Pinsmay(e) Family: Boatman of the Lower Meuse, Liège - 1764

(Boatman or Bargeman= F: batelier, N: Binnenschipper)

 

Along the Meuse we find several families of Bargeman like the Pinsmailles who moved upstream around 1700 from Dinant (Belgium) to Braux (above Charleville-Mézières, France) and the Pinsmayes who descended around 1730 from Sclayn (Andenne, near Namur) to Liège.

We know this Bargeman of Liège from a manuscript Nr 6137 in the " archives du Conseil des Finances " This manuscript describes during the whole year 1764  how the central administration of Brussels controlled the good fonctionning of the douane at the checkpoint of Navagne between Eijsden (The Netherlands) and Visé (Belgium) at the old fort of Navagne (Névaigne) or  Elvenschans.

The Pinsmayes of Liège  transported goods between Namur / Liège (Belgium) in the direction of Roermond in the Netherlands. Some of them are entrepreneurs of middle importance, having several ships (or capable to assembly a certain number of ships to form a convoy), engaging then till twenty man or journaliers (the navigation of a big unit exiged minimum 2 man) and having horses for the way back to Liège. The document noted less of the retour traffic, but we know that they transported on their way back to Liège p.e salt.

Five Pinsmayes  are mentionned as bargeman: Hubert (#8813) made 8 transits at Navagne to Holland, Lambert (#5463, ° 1709, Namur) 10, Pierre Joseph (#6038) 6, Pierre François (#7587) 11  and Pierre Rémy (#5465) 7 transits.

îequently there were discussions with the douane about the load decleared. The 22th of decembre, Lambert (#5463) Pinsmay decleared a load estimed inexact by the guards, who confiscated the load. After verification, he paid the 23th the corresponding rights for 60 undecleared "charrées" of coal, and could then leave. 

 

But because of the uncertainty of their job they had also other occupations* as " relieur" (book binder), "cartier" (making playing cards), "cellier" (Nl: keldermeester): holding a ?wine cellar or more general some food supplies, "journalier" but also "aubergiste", "cabaretier" (holds a tavern, serving alcohol), "cabaretière" etc. In the case of Lambert Pinsmay (#5463), who became bourgeois of Roermond, he was also together with his son-in-law Jan Naus (#5508) owner of the house "In het witte Paard" (F: Au Cheval Blanc, E: In the White Horse) on the market in Roermond.

(* See p.e in the family  of Marie-Françoise Josèphe Painsmaye, daughther of Lambert Pinsmaye (#5463) and her husband (x 1761) André Joseph Delis dit Lespagne)

 

(text based on the article : "LE TRAFIC FLUVIAL SUR LA BASSE  MEUSE EN 1764", André Baltia,

publ. ca 1990 in the " bulletin du Cercle Historique de Fléron")


                                                                                          A mon ancêtre Remy Baltea,

                                                                                naiveur à Huy et Liège en 1635-1640

 

LE TRAFIC FLUVIAL SUR LA BASSE  MEUSE EN 1764.

 Le contrôle du  bureau des douanes de  Navagne - André Baltia

 

Le Conseil des Finances des Pays-Bas Autrichiens

 

Le Conseil des Finances des Pays-Bas Autrichiens, souvent comparé à un véritable ministère des affaires économiques, était notamment responsable des douanes et de la surveillance du commerce[1]. Chacun des départements douaniers et fiscaux des Pays-Bas dépendait d'un bureau principal, vérifiant l'application des droits d'entrée ou de sortie par les bureaux subalternes et centralisant leur comptabilité.  Cependant, le trafic fluvial entre la Principauté de Liège et les Provinces-Unies était directement contrôlé par le bureau principal de Navagne, installé dans une ancienne forteresse en ruines située sur la rive droite de la Meuse à proximité du confluent de la Meuse et de la Berwinne.

 

Cette situation présentait des avantages certains : «  ...Car il est incontestable que l'abord à Navagne est plus propre en tout tems qu'a Lixhe; l'eau n'y manque jamais, le port est très beau, convenable et facile, des arbres à pouvoir attacher les cordes des bateaux, de la place plus qu'il n'en faut et la garde militaires invalides (sic) pour gardes et servir au besoin. Le bâtiment de Navagne est fermé d'une forte muraille qui forme une cour, la place du bureau est séparée et directement vis à vis du milieu;  le côté qui donne sur la' rivière bâti sur la muraille de la cour et le reste dedans ... »[2].

 

Les bateliers étaient tenus de déclarer au bureau la nature et le poids de leur cargaison, et d'y acquitter les droits; pour chacun d'entre eux, les employés notaient dans le registre la date de passage, le type et le nombre des bateaux, les marchandises transportées. En cas de doute à propos de la quantité de matériaux pondéreux, ils jaugeaient le bateau. Les bateaux accostaient une jetée s'avançant d'une dizaine de mètres dans le fleuve pour permettre la « visitation » par les commis de Sa Majesté [3]. Les désaccords entre les bateliers et les agents du Conseil des   Finances  se soldaient   souvent   par une saisie  des marchandises imposant une transaction aux Fraudeurs. Un rapport de 1763 précise que les bateliers n'ont que deux possibilités de Fraude à Navagne : soit en passant nuitamment avec de petites embarcations le long de l'autre rive de la Meuse située en Pays de Liège,  soit descendant avec de grands bateaux, en déclarant une charge inexacte avec la connivence du préposé à la visite [4].

 

En 1764, Fabri, contrôleur du bureau de Navagne, suspecte cependant ses subordonnés, les gardes Michaux, Balant et Hosson, d'un certain laxisme dans leurs fonctions, et fait part de ses doutes à l'administration centrale de Bruxelles. Le 3 novembre, le conseiller de Beelen charge Toubon, précédemment contrôleur principal à Marche en Famenne d'une mission de contrôle sur place, et lui donne des instructions secrètes :

    ... 3) Vous ferés attention à vérifier si les bateliers qui passent à Navagne y acquittent exactement les droits de la totalité de leur chargement, et vous n'amettrés rien pour cela.

        4) Vous vous ferés remettre par le Brigadier Lambermont  un mémoire contenant 

                        1° une description des différentes espèces de bateaux avec les quels on navige sur la Meuse et les dimensions de chaque espèce 

                        2° à combien se monte le chargement de chaque bateau de différente sorte, dans les diverses hauteurs d’eau, avec les marchandises qui passent le plus communément, telles que les fers, les ardoises, pierres, houilles et chaux  

                        3°  la citation des époques où les eaux ont été plus ou moins hautes [5].

Toubon exercera un contrôle précis des notes et mesures prises par les gardes en novembre et décembre 1764, et enverra à Bruxelles une copie du registre tenu par le péage de Navagne pendant  l'année  1764  (68 pages)  et le mémoire dressé par le garde Balant chargé de remesurer  les bateaux   pendant le mois de décembre 1764 (6 pages). Ces documents figurent dans la farde 6137 des archives du Conseil des Finances et font l'objet de l'analyse qui suit. L'enquête se poursuivra jusqu'en février 1765. Les fautes étaient probablement légères; les gardes soupçonnés seront maintenus en fonction pendant les années suivantes, sans avoir encouru de sanction notable semble-t-il.

                            

 Les anciennes mesures.

 

Avant d'exposer les données quantitatives qui ressortent de ces documents, il convient de rappeler quelques mesures anciennes.    

Les quantités de chaux étaient estimées en muids, les houilles en gonges ou gangues, le charbon en charrées ou charretées) et la charge totale d'un bateau en lasts.    

A Liège, une charrée de charbon  = 1838 kgr.  = 24 gonges ou ganques ou mesures de 164 livres (environ 76,6 kgr). Les gonges sont réservées exclusivement à la mesure du poids des charbons, et dans le document dont l'analyse suivra, spécifiquement à la houille. Mais, par disposition  du 29 octobre 1753, le Conseil des finances des Pays-Bas avait fixé la charrée de menue houille à 4000 livres, soit 1868 kgr [6].

Le last, unité de jaugeage des bateaux,  vaut aussi une charrée [7] Le last déplace approximativement  72 pieds cubiques.     

Le muid (environ 246 litres) est utilisé entre autres pour la mesure de la chaux. Les commis du Conseil des Finances obligeaient les bateliers « à déclarer le muid à raison de 3200 livres, souvent 3400, tandis qu' il pèse plus ou moins qu' elle est bien ou mal cuite ». Exemple: 90 muids de chaux = 72 lasts [8].     

La tonne ne désigne  pas une unité de mesure, mais un grand tonneau renflé par le milieu servant au transport de certaines marchandises telles que le charbon de bois, les écorces de chêne moulues etc.

La toise ou jauge des bateaux était estimée par les agents du Conseil des Finances en appliquant la formule suivante : longueur x largeur x hauteur immergée (en pieds)  =    Nombre de lasts x 75 ou 80. On avait préalablement noté lors d’une remonte « ce qu’ils prennent dans l’eau étant vuides »[9].

Toutes les mesures qui figurent dans les documents ont été converties en unités actuelles.

 

 Le contenu du registre

 

En 1764, 171 bateliers, liégeois pour la plupart, ont fait au bureau 1010 déclarations distinctes. Certains  dirigent des trains de dix  à douze   bateaux   et dans ce cas leur îéquence de passage est   plutôt faible; d'autres ne transportent sur une, deux nacelles ou  une vlègre que de modestes chargements, mais Franchissent plus souvent la limite territoriale. Du 1er  janvier au 31 décembre,   les buralistes ont noté l'entrée aux Pays-Bas de 2061 bateaux : 190 aack, 56 mignolles, 3 nacelles de Hollande, 1201 nacelles et 610 vlègres.

 

 Les bateaux.

 

L' aack est un chaland long de 90 à 92, large  environ 10 pieds. Selon le registre du péage, il peut transporter de 70 à 95.000 kgr.      

La mignolle est le plus grand des bateaux mosans :   ... « les batteaux appellés nacelle de Hollande et ceux nommés mignolles qui sont les plus grands, à mats et couverts sont ordinnairement chargés   de chaux... »[10].     Grandgagnage la décrit comme un bateau couvert, dont le bordage    est  disposé  de manière particulière,   d'un port d'environ 70 tonneaux. Des charges de 112 à 130 tonnes sont cependant mentionnées (9 janvier et 15 décembre 1764). Les dimensions de certaines mignolles sont précisées par le garde Balant: longueur 96 pieds, largeur 11 pieds 9 pouces pour une, 96 pieds et 9 pieds 8 pouces pour une autre. Une autre source[11] donne les dimensions suivantes:  « Minolle 97 pieds - largeur 11 pieds 8 pouces - hauteur d' eau du bord 5 pieds 5 pouces ... »[12].

La vlègre (vleger, vlieger) : embarcation de 55 à 75 pieds de long, large de 7 à 8 pieds qui emporte habituellement une charge de 25 à 35 tonnes et est probablement assez semblable à une "nacelle d'Ourthe" ou "bètchète" (18 à 20 mètres, largeur environ 2 mètres, hauteur 0,80.): «  ... une nacelle qu'on nomme nacelle d'Ourte, ou une nacelle qu'on nomme vleger attachée à la barque marchande en montant, paie trois sols de change pour l'attachement;  ...une nacelle ordinaire montant attachée à ladite barque paie f 0 - 1 - 6 de change pour ledit attachement [13]. Comme les autres bateaux, la vlègre est souvent accompagnée d'une ou plusieurs nacelles.  

Les nacelles sont de petites unités maniables pouvant déplacer 7.500 à 13.000. A la descente elles transportent une charge d'appoint, lors du halage elles permettent aux bateliers de changer de rive et aident à la manoeuvre. (Petite barque, le fond est plat et la poupe et la proue se relèvent en pointe aiguë. Présentée généralement avec deux rames. Pays Bas et Flandre).

Les   "hernas et "pascheppes", bateaux souvent mentionnés dans d'autres sources[14] ne sont pas cités dans le registre. On peut cependant noter que le herna est un bateau dont la proue et la poupe sont fortement courbés, mais dépourvu d'étrave vive, au bordage vertical, souvent muni d'un petit habitacle. Sa longueur pouvait atteindre 95 pieds  et sa largeur 11 pieds 4 pouces[15].   

Les différents types de bateaux se distinguent donc plus par leurs formes, mat, gouvernail, pontage que par leurs dimensions. Dans les textes anciens, la même appellation aussi désigner des embarcations différentes [16].  L'imprudence des bateliers est notée par les agents du Conseil des Finances: « ... Les bateaux qui assez souvent n'ont que trois à quatre doigts hors de l'eau... »[17]. Un coup de vent pouvait évidemment les faire chavirer. Mais ils voyageaient souvent avec une charge incomplète : la Meuse n'avait bénéficié d'aucun aménagement notable de son profil pendant plusieurs siècles. En 1812 encore, le tirant eau moyen n'atteignait localement qu'1,20 mètre et même 0,50 mètre à l'étiage, ne permettant que le passage de bateaux à fond plat  chargeant  60 T., et même 9 T. aux basses eaux [18].  La remonte était lente et pénible. En 1839, la traversée de Liège exigeait encore 4 à 5 heures en été et 7 à 8 heures en hiver [19].

 

Le îet à destination des Pays-Bas.

 

 Les données mensuelles relatives au transport des matériaux pondéreux (chaux, houille,    charbons, pierres travaillées provenant parfois de la région de Namur, terre, fers, ont été regroupées dans un tableau en regard du nombre de jours pendant lesquels la navigation a été possible. Les houilles et charbons ne payaient pas les mêmes droits. La houille dite maigre, quoiqu'en gros blocs payait cependant la même redevance que le « menu charbon ».     

Compte tenu des Fraudes, ces estimations pondérales doivent être considérées comme minimales.

 

 Pour chaque mois, on indique le nombre de jours ouverts au trafic fluvial. Quantités exprimées en kgr.

Date Jours ouv. Chaux   Houille   Charbons   Pierres   Terre etc.   Fers
Janvier (11/30) 124.712   208.990   183.372       196.140 (terre à pipes) 374
Février (09/29) 79.326   322.902   344.322            
Mars (17/31) 321.957   237.664   1.113.944   31.756       247
Avril (20/30) 1.415.110   437.474   1.652.668   206.881       62.437
Mai (22/31) 321.001   132.559   1.220.164   97.136   1.868 (terre) 3.353
Juin (19/30) 21.130   216.888   1.180.145       28.020 (volarde) 723
Juillet (23/31) 247.257   240.958   1.397.443   69.116       1.377
Août (30/31) 342.185   270.036   2.142.620  

158.780

      3.582
Sept (28/30) 241.278   228.341   1.728.210           10.292
Octobre (27/31) 1.230.309   672.198   3.090.874   6.538   4.670 (couperose) 8.548
Novembre (27/30)  923.587   511.244   2.924.257   794   117.684   7.296
  13.760  (chaux grise à ciment)     (terre à pipes)      
Décembre   556.515   294.654   2.013.665   24.284       2.244
                       
Total :   7.855.127   3.773.908   18.991.704   595.285   348.382   100.473
       Houille et Charbons  

22.765.704

           
Total général :    31.664.879     soit  31.665 T.

 

En plus de ces matériaux pondéreux,  on relève notamment les exportations:

-  d'ardoises: bleues:  553.000 entières, 566.000 demies - ardoises rouges: 457.000 entières, 69.000 demies.  - qualité non spécifiée: 71.500.

- de bois:  à brûler  pour une valeur de 307 écus et de 1879 florins. 11 charrées de bûches valaient 50 florins et une seule vlègre pouvait assurer ce transport.               

-  de planches de chêne, de jantes, de clappes ou douves de tonneau [20].

-  de charbon de bois: 421, 5 tonnes (= grands tonneaux). Une valeur de 3 florins était déclarée pour 6 tonnes, la tonne pesant environ 100 livres.

-  de houblon: 4.421 livres pour l'année 1764.

-  de quelques pièces de vin, de grosses de cartes à jouer.

 

 

L'interprétation de ces résultats est malaisée.

  

Dès la seconde moitié du 17e siècle, la multiplication des tonlieux sur la Basse-Meuse (18 entre Liège et Dordrecht) et les droits prohibitifs grevant la voie fluviale avaient entraîné une diminution de l'activité batelière au profit du transport par route [21]. L’exportation vers les Provinces Unies  de 22.000 T. de charbon peut sembler médiocre; on peut cependant la conîonter avec  les 64.000 T. exportées par la Meuse vers la Hollande en 1841, au début de l'essor industriel [22]. Après le  ralentissement hivernal des premiers mois de l'année, qui  atteint lui aussi le transport par la route [23], les quantités mensuelles de charbon  montrent un accroissement  prévisible à l’approche  des nouvelles intempéries. Mais on explique moins bien l'augmentation des livraisons de chaux en octobre, novembre et décembre, mois peu propices aux travaux de construction. Sauf pour janvier et février, il n'y a pas de corrélation entre le débit moyen mensuel de la Meuse tel que connu actuellement, et les quantités mensuelles de matières pondéreuses transportées.

 

La part des produits sidérurgiques parait infime par rapport aux capacités de production de l'industrie liégeoise, même en période de récession : 100.000 kgr de produits semi-finis : fer en « verges »,  en  « plattes »,   ou  finis :  en « buses »,  en « payèles » [24].  Le16 avril, Dieudonné Lefèvre avait livré à lui seul de Liège à Venlo 65.000 livres de fer fendu et 55.000 livres de fer en verges. Sur ces 100 tonnes, les cloux n’interviennent que pour 7.105 kgr. Ces chifîes confirment la récession profonde qui depuis de début du 18e Frappait la clouterie liégeoise et a été largement mise en évidence [25]. Le registre distingue le îet à destination de Maastricht (81 T. de charbon), de Ruremonde (53 T. de chaux, 915 T. de charbon) et de Venlo   (297 T.  de chaux,   910 T. de charbons) pour l'année 1764. Les bateaux à destination de ces villes n’emportaient souvent qu'une charge très inférieure à leur capacité maximale. 

 

 

Le trafic vers Liège

 

Seule est notée la nacelle de François Gillard, qui remonte le 22 mars avec 612 malder de seigle, des ferrailles pour 24 florins, 20 fromages de Hollande (valeur 8 florins) et du vieux cuivre pour 50 florins. Le contrôle des droits de sortie des Pays-Bas était peut-être consigné dans un autre registre qui ne nous est pas parvenu. On sait cependant que les bateliers liégeois ramenaient du sel de Hollande [26].

 

Les naiveurs.

 

Certains apparaissent comme des entrepreneurs de moyenne importance, possédant plusieurs bateaux (ou capables d’en réunir un certain nombre pour former un convoi), pouvant engager dix à vingt hommes ou journaliers (la manoeuvre d'une grosse unité exige au moins deux hommes) et disposant de chevaux de halage pour la remonte. Les documents nous restituent l’activité de quelques bateliers liégeois au cours de l’année 1764.

 

Mathieu HACHA : il totalise 13 contrôles au bureau de Navagne.

Exemples :  

Le 1er   février, il descend avec 5 aack, 1 mignolle chargés d'environ 390 T. de chaux et de charbon ...   et 10 grosses de cartes à jouer 

Le 15 avril, à destination « de la Hollande » :  4 aack,   4 vlègres, 265 T. de chaux et de charbon, plus 50.000 ardoises bleues.

Le 23 avril, de Liège à Venlo : 3 aack, 3 nacelles, plus de 200 T. de charbon, plus 50 T. de charbon de Cheratte (exempt de droits parce que provenant du Limbourg), 3.000 ardoises bleues, 3150 livres de fer, 3 pièces de forge de Liège.

Le 9 juillet : 5 aack, 3 nacelles, 11 vlègres, 235 T. de charbon et 10.000 ardoises bleues.

Le 13 août : 7 aack, 2 mignolles, 5 vlègres emportant plus de 300 T. de charbon et 85 lasts de pierres travaillées et deux grosses de cartes à jouer.

Le 19 août : 5 aack, 2 nacelles, 4 vlègres, 200 T. de chaux et de charbon, 600 livres de cloux, 60 livres de fer en ouvrages de serrurerie, 45 livres de fer en "payèles". 

Le 6 octobre : 8 aack, 1 nacelle, 9 vlègres, près de 520 T. de chaux et de charbon. Une petite partie du charbon (50 malder) est destinée à la garnison de la ville de Gueldre (Geldern au nord de Venlo). En outre, 6 charrées de charbon réparties sur 2 nacelles vont à Ruremonde.

Le 23 novembre : 3 mignolles, 4 vlègres, une charge totale d' environ 380 T. dont 550 livres de cloux, 500 livres de fer en  « poteries », 525 livres de fer battu.

 

Les PINSMAY(E) : ils sont cinq : Hubert (#8813) transite par Navagne 8 fois, Lambert (#5463)  10,(et ses 3 fils - ajoute de W. Spincemaille) Pierre Joseph (#6038)  6, Pierre François (#7587)11, Pierre Rémy (#5465) 7 fois.           

Quelques passages de Lambert Pinsmay

Le 11 février : 3 aack, 1 sabot, 90 T. de charbon de terre, 18 tonnes ( = grands tonneaux) de charbon de bois.

Le 22 mars :  9 aack, environ 260 T. de charbon, 207.000 ardoises rouges. 

le 18 avril,  à destination de Venlo : 5 aack, 3 vlègres, presque 360 T. de  charbon et 600 livres de fer.

Le 26 avril :  1 aack pour Ruremonde, avec 78 T. de charbon, 8 aack et un nacelle pour Venlo transportant 269 T. de charbon dont 130 extraites à Cheratte, 20.000 ardoises bleues, 170.000 ardoises rouges, 2500 livres de cloux.

Le 8 août : 8 aack, 3 nacelles, 200 T. de charbon, 1.000 livres de  fer  en « poteries »,  1.000  livres  de   fer  en  verges et en platines.

Le 20 octobre : 3 aack, 1 nacelle, 1 vlègre une charge totale de près de 250 T. dont 2.000 livres de fer en verges et 600 livres de fer « travaillé ». 

Pierre Joseph Pinsmay :

déclare le  7 janvier 218 T. de chaux et de charbon répartis sur 1 mignolle,  une nacelle et une vlègre.     

Pierre Rémy Pinsmay:

Le 27 mai : 3 aack, 1 vlègre, 128 T. de chaux et de charbon.

Le 23 décembre : 2 aack, 1 vlègre, 170 T. de charbon et 250 livres de houblon.    

Les Pinsmay  donnent certainement l’exemple du métier exercé par une cellule familiale, et relevé de génération en génération

 

D’autres sont de petits transporteurs cabotant entre Liège, Visé et Maastricht.

Les DEPREZ : Joseph et Renier ont été respectivement notés au registre 20 et 47 fois au cours de l’année.  Ils utilisent le plus souvent une vlègre, une ou deux nacelles leur permettant une charge de 35 à 45 T.  Mais ils n'embarquent le plus îéquemment que deux à quatre charrées de charbon sur une seule nacelle. Lambert, Mathieu, Paul et François WOUTERS : le registre consigne leur passage respectivement 33, 22, 12 et 4 fois. Lambert utilise parfois deux nacelles et deux vlègres, Mathieu ne transporte généralement  que deux à trois charrées de charbon sur une seule nacelle.  Leur envergure économique est du même ordre de grandeur que celle des Deprez.    

 

Mais le métier de naiveur n'est pas exclusivement réservé aux hommes: la veuve de Jean DEMEUSE est responsable de 10 convois d’importance moyenne, la veuve WILLEMS en afîète 12. 

 

 

Les Fraudes

 

Les tentatives sont assez îéquentes : le 22 décembre, Lambert Pinsmay déclare un chargement estimé inexact   par   les   gardes, qui  en  font la saisie. Après vérification et transaction, il paye le 23 les droits afférents aux 60 charrées non déclarées, et peut alors repartir.     

Le 23 décembre, Jean de Houlle omet de déclarer 9.000 ardoises rouges et 3.000 bleues. Après saisie, il est contraint de payer les droits supplémentaires le 24 décembre.

 

Conclusions

 

L'interprétation des différentes données quantitatives extraites du document analysé devrait s'inscrire dans le contexte économique, politique, démographique, etc. mais cet article se limite à la présentation de quelques points.

On peut cependant retenir que pour l'année 1764 les exportations wallonnes par voie mosane vers l'aval s'élèvent au moins à 31.000 tonnes, dont 25% sous forme de chaux et 70% sous  forme  de houille et charbon.     

Les produits sidérurgiques semi-finis y interviennent pour une centaine de tonnes.     

Certains bateliers peuvent réunir une flottille d'une douzaine de bateaux de différents types, mais cette industrie conserve à l'évidence un caractère familial et artisanal.

 

 

Bibliographie

 

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Hansotte G.   L' industrie métallurgique dans la vallée de la Vesdre aux temps modernes. BIAL tome LXXV 1962 p. 164-220.

Haust J. Dictionnaire Liégeois Liège, Vaillant Carmanne 1933.

de Jaer L.  Pourquoi le charbon se vend-il à Liège par charrette de 188 kilos ? Chronique Archéologique du Pays de Liège 1939 p. 41-47.

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Suttor M.   La Navigation sur la Meuse moyenne des origines à 1650. Centre belge d'Histoire Rurale, publication n° 86, Liège et Louvain 1986.

Yans M. La Meuse et nos relations commerciales avec la Hollande. BIAL tome LXIII 1939 p. 130-140.

 

                                                                                                                         André Baltia

 


[1] Les archives du Conseil des Finances (CF) sont conservées aux AGR,  et leur inventaire a été établi par Placide et Joseph Lefévre  en 1938. Le fonds se compose de plus de 9.000 articles qui sont souvent d’un grand intérêt pour l'histoire économique locale des départements fiscaux de Marche, Luxembourg, Saint-Vith, Navagne, Ruremonde etc.

[2]  CF 6137

[3]  CF 6137

[4]  CF 6154

[5]  CF 6137

[6]  CF 6154

[7]  CF 6154

[8]  CF 6154

[9] Le dénominateur permettait une jauge approximative tenant compte des formes arrondies ou effilées des bateaux. Il a parfois varié : le 27 sept. 1775, le CF ordonne aux commis d'appliquer le diviseur 80, et de déduire en outre 1/10 de la quantité de lasts ainsi trouvés (CF 6154). Le 22 janvier 1785, le Conseil impose de diviseur 75 au lieu de 80. Les bateliers liégeois s’estiment dès lors lésés d'un seizième et adressent le 14 août 1786 une supplique à Bruxelles.     

On utilisait aussi d'autres unités de jauge que le last. Henri Halleux, marchand et batelier à Esneux de 1759 à 1800, et utilisant probablement une bètchète, tient ses comptes en  « navées »,   équivalentes  de 5 clichets  ou charrées, par exemple de pierres à paver. Le clichet ou clitchet était un tombereau semblable à la charrette à houille. 

[10]  CF 6137

[11]  CF 6154

[12] La longueur maximale ne semble pas avoir progressé depuis le Moyen-Age. Rousseau signale que des vaisseaux scandinaves de 24 mètres, au bordage d'un mètre, pouvaient alors atteindre Maestricht. 

[13]  CF 6129

[14]  Questienne, Suttor

[15] CF 6154

[16]  Questienne

[17]  CF 6138

[18]  Demoulin - Dans une supplique adressée par les bateliers de la Meuse au Conseil des Finances le 14 août 1786 (CF 6154), il est affirmé que « leurs bateaux chargés restent quelques fois très long-temps, même un an et plus au port, avant d'avoir l'eau nécessaire à leur descende ... »

[19]  Suttor, Demoulin

[20]  Les clappes étaient flottées et descendaient sur l’Ourthe de Barvaux à Liège , assemblées en "trains" de 75 à 120.000. 

[21]  Yans

[22]  Demoulin

[23] Guérin P. Bul. Cercle Historique de Fléron mars 86 : ralentissement des exportations cloux par le marchand H.J. Rodberg, d' Ayeneux, en raison l' interruption du trafic sur les chaussées en période de et de dégel. 

[24]  Payèle : Haust lui donne le sens de travail à marché qui ne peut s’appliquer ici. Grandgagnage lui attribue une définition plus satisfaisante : grand vase en fer pour raffiner le sel.

[25] Guérin, Cercle Historique de Fléron mars 86.  Hansotte :entre 1720 et 1770, la moitié des fenderies liégeoises avait disparu. 

[26] Accord avec les bateliers sur le commerce du sel en 1756. Bul. Cercle Historique de Fléron sept. 1988.